Lune Bayou : pas à pas

par Bob Aldus Bouexi


"Comment ces chansons ont-elles survécu dans une Amérique anglophone ? On ne peut pas le savoir. Ce qui est sûr, c'est que ces chansons sont toujours là, ne demandant qu'à être chantées, à être redécouvertes, à revivre, à s'habiller de nouvelles harmonies, de nouveaux instruments et de nouveaux sentiments aussi."

Roger Mason, Jolie Blonde et Aimable Brune (2019), les éditions Tintamarre.


Genèse

Au cours de l'année 2018, après avoir joué en version big band durant quasiment un an, l'idée d'enregistrer, afin de proposer un album reflétant fidèlement les concerts, a commencé à germer dans nos têtes. Le plus simple aurait sans doute été de réaliser un enregistrement live et cette éventualité a sérieusement été envisagée d'autant que nous enregistrons régulièrement nos concerts, si le dispositif en place le permet. Cette technique est sans doute la plus fidèle aussi pour permettre au public de s'offrir à la maison une restitution de ce qu'ils ont pu entendre durant nos concerts. D'un point de vue purement logistique, c'est aussi plus simple pour nous car réunir dix musiciens pour une session d'enregistrement, ce n'est jamais simple... Après réflexion, beaucoup de lectures et d'écoutes sur le sujet, l'envie de tenter de produire un album studio pouvant refléter l'explosivité des concerts du Cajun Bouexi Band, avec un son un peu plus "signé" et travaillé, a pris le dessus. Un pêché d'orgueil diront certains, une folie diront d'autres. Mais Buster, Jean-Baptiste et moi étions convaincus de pouvoir y arriver. D'autres l'ont déjà fait, des plus illustres ont emprunté ce chemin alors, naïvement, on s'est dit pourquoi pas nous ? On avait aussi le désir de s'immerger dans ces chansons, d'en comprendre la mécanique et corriger le tir si besoin. Un véritable défi pour un groupe qui existe essentiellement pour le live et construit ses arrangements dans ce but. Initialement  d'ailleurs, ce disque devait être un album de fête et le titre alors envisagé était Gran Fête. Mais ça c'était au début...


Les sessions de janvier 2019

Fin 2018, des répétitions ont eu lieu afin de préparer la session d'enregistrement et au cours de celles-ci, de nouvelles chansons ont été incorporées à notre set list. Celle-ci est, par nature, assez changeante car le répertoire cajun est un puits sans fond qui regorge de chansons qui ne demandent qu'à être jouées. La difficulté étant d'ailleurs, souvent, de se restreindre... Ces nouvelles chansons ont amené une nouvelle couleur et des interprétations plus grave que d'habitude. L'hiver sans doute en a été la raison, couplé à l'envie de provoquer et confronter ces chansons traditionnelles à de nouveaux arrangements. Le but avoué et revendiqué du Cajun Bouexi Band en version big band étant justement de réinterpréter totalement les chansons issues du répertoire traditionnel, de se les réapproprier en leur choisissant un nouvel "habit" qui passe parfois par une musique totalement revisitée tout en conservant la mélodie initiale.

Muni de cette liste de chansons actualisée, la session d'enregistrement a pu être programmée pour janvier 2019 sur deux jours. L'idée était de créer une base enregistrée live en studio et donc très vivante du groupe, capturer cette énergie qui caractérise nos concerts et peaufiner par la suite, par des sessions individuelles, les chansons initialement gravées.  Avec Buster Aloysius nous nous occupons de gérer l'intendance et le fonctionnement de tout ce qui touche de près ou de loin au groupe (et de pleins d'autres choses...). Nous avons fait part à Jean-Baptiste et Michel Poupard (prise de son) de notre envie de produire un son explosif inspiré par l'album The River de Bruce Springsteen & The E Street Band (si, si rien moins que ça !). Pour cela  nous nous sommes dirigés vers une salle proposant un parterre en bois dans un espace très vaste tel le boss qui jadis avait investi les lieux du fameux studio A au Power Station à New York, un peu dingue non ?

Malheureusement, quelques semaines avant le début des sessions, des travaux ont dû avoir lieu dans cet endroit, le rendant inaccessible. Une autre salle fût donc trouvée : la salle communale de La Bouëxière, la même que celle utilisée pour le premier album. Elle disposait aussi d'un environnement assez grand pour accueillir le big band mais qui nécessitait beaucoup d'aménagements en terme d’acoustique. C'est une véritable entreprise de réaménagement de la salle qui a été mise en chantier pour pouvoir la rendre totalement utilisable afin d'y enregistrer correctement le big band. De multiples box y ont été littéralement construits afin d'isoler le plus possible les musiciens les uns des autres et favoriser une prise de son optimale. C'est Michel Poupard, déjà à l’œuvre sur le premier album Gran Texas, accompagné de Jean-Baptiste Amar-Huet qui ont imaginé et réalisé l'agencement et la mise en place des micros pour la prise de son. Le groupe s'est alors lancé dans l'enregistrement de dix-sept titres en deux jours, limitant le nombre de prise afin de conserver le plus de spontanéité possible.


Entre déconvenue et espoir...

Une fois les enregistrements récoltés, le temps était venu d'écouter (beaucoup écouter) et faire inévitablement des choix afin d'éliminer les chansons qui ne répondaient pas au critère de spontanéité voulu ou tout simplement qui n'étaient pas réussies. La première déconvenue a été de s'apercevoir qu'un des titres phares de nos concerts, Les haricots sont pas salés, ne fonctionnait absolument pas en studio. L'apport du public est indéniable car il y a un jeu de question/réponse permanent tout au long de la chanson avec en plus des passages instrumentaux où peuvent s'illustrer les fabuleux solistes qui composent le groupe dans un duel fraternel. Nous avons donc dû laisser de côté cette chanson, pour notre plus grand désarroi. Il en a été de même pour une version du classique Jolie Blonde qui a généralement un bon retentissement dans le public, décidément on s'éloignait dès le début du concept de disque festif. Lors de ces écoutes, nous nous sommes aussi aperçu de certains problèmes techniques qui ne nous permettraient pas lors du mixage d'obtenir le son voulu, ce qui supposait qu'il allait falloir un peu plus de sessions individuelles que prévu. Aussi, nous nous sommes aperçus que les nouvelles chansons sonnaient remarquablement bien, et bien souvent c'était des tempos plus lents avec des sonorités plus graves, l'album commençait sa mutation...

les sessions individuelles

Nous enregistrons systématiquement toutes les répétitions ainsi que les concerts dès que nous en avons l'occasion. Cela nous permet parfois de retenir un riff, un chorus, un groove qui parfois peut se perdre avec le temps. Aussi avec Buster nous avons confronté les démos des répétitions avec les enregistrements. Les chorus des démos, qui sont par définition des premiers jets spontanés, étaient très souvent plus accrocheurs que les versions de l'enregistrement. Une autre raison de réaliser des sessions individuelles... C'est à partir de ce moment que celui que nous allions appeler par la suite "Magic" Jean-Ba a pris la main sur la réalisation de l'album. Il a plongé en immersion totale pour n'en ressortir que de brefs moments avant d'y retourner jusqu'au mixage final. Chaque titre a donc fait l'objet d'un premier mix méticuleux afin de permettre aux musiciens de travailler sur des chansons quasi abouties, ce qui a nécessité de carrément réaliser un mix par musicien et par chanson ! On ne se rend pas bien compte du temps passé à réaliser cette tâche, mais je peux vous assurer que c'est colossal, surtout pour un big band ! Ainsi quasiment tout le monde sauf Guy Vaultier à l'harmonica (bravo Guy !) a dû refaire des parties de ses enregistrements pour arriver à ce que nous avions en tête.

Été 2019, ça commence à prendre forme

Nous nous retrouvons à l'été 2019. Une belle année en cours pour le Cajun Bouexi Band qui correspond à celle où il y a eu le plus de concerts à la fois en big band et en quintet. Mais ça ne laisse par contre pas beaucoup de temps pour le reste et notamment pour l'album. Cependant, un album en gestation c'est comme le vin, il faut savoir le laisser se poser pour que par la suite, il vous offre de nouvelles saveurs. Et c'est effectivement ce qui nous est arrivé ! "Magic" Jean-Ba, Buster et moi, nous sommes confrontés durant plusieurs jours et nuits au mix à la maison afin de plonger dans les différentes sessions et faire des choix, toujours des choix. Couper, désosser, dénuder, dépouiller pour mieux reconstruire. Et plus on avançait et plus l'album prenait une direction inattendue certes mais incomplète, inaboutie. On se séparait, au fur et à mesure, de certaines chansons qui nous paraissaient au début évidentes dans le track list final mais qui ne cadraient plus du tout vers là, où sans arriver à le formaliser, nous souhaitions inconsciemment aller. Pourtant certaines chansons avaient de réelles qualités avec des chorus ravageurs comme "Le blues de Bosco" (le chorus de guitare de Carlos Manuel Sangria et l'harmonica de Guy Vaultier) ou La bouteille a ruiné ma vie (le solo de sax de Julien "Sugar Bee" Tahier). Mais ça ne cadrait plus avec d'autres chansons plus intenses et plus graves qui se révélaient, elles, indispensables. Les enregistrements additionnels réalisés alors ont été déterminants. C'est incroyable comme une seule note bien placée, un son bien approprié peut transformer une chanson toute entière. Ces choix ont été mûrement réfléchis et discutés voire même disputés !

Changement de décor

En septembre 2019, nous avons laissé reposer tout ce travail estival intense pour nous concentrer sur les concerts de la fin de l'année. Se sortir les chansons de la tête et trouver le second souffle nécessaire pour finir le travail. Nous pensions alors en fin d'année reprendre le mix pour terminer le travail et nous avons décidé de migrer dans un studio acoustiquement traité pour terminer le mixage de manière plus affinée. Nous avons donc organisé plusieurs sessions au Studio La Nouvelle Vague à Saint-Malo. Chaque titre a été repris minutieusement, mais si nous avions la certitude de terminer l'album avec La dernière danse, que nous tenions avec Les barres de la prison notre plus belle réussite, nous avions encore de nombreux doutes sur la direction à donner à l'album. Nous savions que l'album ne serait pas une Gran fête mais un reflet plus subtil de l'éclectisme affirmé que nous avons au sein du groupe. Avant tout Jean-Baptiste, Buster et moi sommes de gros consommateurs de musiques et nous avons intrinsèquement toutes ces influences qui s'expriment de façon assez libératrice dans les arrangements que nous réalisons tous ensemble lorsque nous élaborons les chansons. C'était sans doute ça la ligne directrice à suivre : l'éclectisme. L'album continuait donc de naviguer d'une rive à l'autre entre joie et moments intensément graves sans aboutir à un ensemble cohérent. Et quand vous en êtes à ce stade là et que vous ne trouvez pas la porte de sortie, vous savez que ça va prendre encore pas mal de temps jusqu'à ce que l'élément déclencheur arrive. Et il arriva...

Un qui fait tout

Sur la fin de l'année 2019, de septembre à décembre, nous n'avions essentiellement que des concerts en quintet, formule où nous jouons de façon plus traditionnelle le répertoire cajun. Nous avions même une résidence (un temps défini et relativement long où nous travaillons de manière autistique les chansons mais aussi les lumières, la mise en scène...) prévue en tout début d'année 2020 pour prendre le temps de donner aussi de l'importance à ce line up. La dynamique en quintet et en big band est radicalement différente. Nous jouons d'ailleurs différemment avec un répertoire en partie distinct et souvent nous rencontrons des gens qui nous disent aimer telle formule plutôt qu'une autre, ce qui est pour nous assez rassurant car nous avons cette chance d'avoir deux groupes en un que nous souhaitons malgré tout différents. En définitive, rares sont ceux qui aiment de manière équitable les deux entités, et il y en a sans doute beaucoup plus qui n'en aiment absolument aucune ! Comme toujours, nous explorons de nouvelles chansons et chacun amène sans que cela soit ordonné ou défini, une ou plusieurs chansons ou pas, en fonction de ce qu'il a glané. Sur ce début septembre, c'est Buddy, notre formidable chanteur mélodéoniste qui me parle d'une chanson qu'il souhaiterait bien mettre à notre répertoire  : "Carolina Blues". Une chanson propice à laisser exploser son incroyable énergie vocale. Comme d'habitude, Buster et moi jouons aux musicologues et creusons le sillon de chaque nouvelle chanson pour aller chercher les différents textes, les différentes interprétations, l'histoire de la chanson... On fait ça à chaque fois et en plus on aime ça ! Une version retient notre attention, celle des Lost Bayou Ramblers sur leur fabuleux Mammoth waltz. On entend aussi dans cette chanson la fausse simplicité des premières heures du Velvet Underground couplée à la rusticité des country blues de Charley Patton. Il y a quelques choses de différents dans cette chanson que nous n'avons pas encore exploré. Très vite, elle devient carrément une obsession. Nous aboutissons à une très bonne version en quintet que nous nous empressons de jouer pour la première fois dans un lieu de circonstance : La Maison du Blues. Un endroit incroyable situé à Châtres-sur-Cher et géré par des gens adorables. Nous avons même eu droit à une visite privée par le maître des lieux : Jacques Garcia dit "Black Jack", mémorable. Dès la première fois, la chanson rencontre un beau succès en concert et génère une ambiance commune aux Barres de la prison qui paressait isolée dans notre répertoire. En fin d'année nous revoyons à nouveau le big band en répétition et une première tentative très électrique mais non concluante est réalisée. Lors d'une deuxième répétition, nous mélangeons à la fois l'intensité acoustique piochée chez Henry's dream de Nick Cave & the Bad Seeds aux percussions hypnotiques empruntées aux rythmes amérindiens et c'est la bonne formule. Le lendemain, nous renouvelons l'expérience en ajoutant la guitare électrique de Thomas Ottogalli qui y mêle des nappes de guitares héritées des expériences de Daniel Lanois pour lier le tout. Depuis ce moment, je sais que nous tenons la chanson qui va enfin donner un sens à tout le reste de l'album. La fin peut commencer.


Et le virus arriva...

Comme tout le monde, nous avons vu enfler la rumeur jusqu'à ce qu'elle devienne réalité : confinés. Impossible de se produire en public mais aussi de continuer à travailler sur l'album. Ce temps suspendu a cependant été aussi matière à réflexion. Les écoutes répétées et les concertations nous ont amené petit à petit à exclure certaines chansons (J'suis content d'être un cajun, Le blues de Bosco, Moi j'ai une tit' femme, Parlez-nous à boire...). Mais j'étais à présent convaincu que nous commencerions par Carolina Blues et que nous terminerions par La dernière danse  et qu'au milieu il y aurait Les barres de la prison. Très souvent une chose négative appelle un évènement positif, on appelle ça le yin et le yang sur un autre continent. Aussi, grâce à cette période de latence, les choses se sont une fois de plus affinées et nous étions prêts à terminer cet album.

Un titre pour l'album

Il y a plusieurs façon d'aborder la construction d'un album et avec mon frère (tout aussi fanatique que moi en matière de musique), nous avons ce qu'on appelle entre nous "la machine à fantasme", que nous alimentons par beaucoup de lectures et d'écoutes, et qui fonctionne très bien. On est convaincu que dans beaucoup de cas, un album recèle bien plus de secret qu'il le laisse paraître, enfin pas pour tous les albums quand même... On est de cette génération qui a débuté son éducation musicale avec des vinyles et qui a vu l'avènement du tout numérique. Éplucher une pochette, qu'elle soit chargée comme Sgt. Pepper's ou épurée comme The Joshua tree, provoque chez nous une curiosité obsessionnelle qui nous pousse à analyser encore plus profondément chaque chanson, chaque son, tel arrangement ou telle interprétation. Les rééditions et making of ont par la suite alimenté cette manie. Aussi, tout naturellement, quand on a cherché un nom pour l'album, on a creusé dans nos fantasmes liés à la musique de La Nouvelle-Orléans, aux albums qui y ont été enregistrés et produits. On a une affection toute particulière pour la trilogie louisianaise de Daniel Lanois qui est constituée de Yellow Moon des Neville Brothers, de Oh Mercy de Bob Dylan et de Acadie du même Daniel Lanois. Quelque part, je crois que ces albums m'ont toujours accompagné depuis le début du Cajun Bouexi Band et il fallait bien leur rendre hommage à un moment. Mon frère m'avait offert une fabuleuse édition vinyle du Creole Moon de Dr John et c'est le croisement entre le Yellow Moon des Neville Brothers, ce LP et nos références fantasmées et mystiques des bayous qui ont abouti à ce que mon frère trouve un nouveau nom pour l'album : Lune Bayou. On était parti sur Moon Bayou, mais mon frère a suggéré, à juste titre, de conserver le français à l'anglais et c'est bien mieux comme ça. Il ne manquait plus qu'à lui donner maintenant un corps. L'histoire aurait pu s'arrêter là, mais en fouillant sur la toile, on a trouvé une référence à la "lune bayou" dans l’œuvre "Journal d'un raconteur" d'un  artiste et activiste louisianais ayant sévi au siècle dernier : Napoléon Broussard. C'est une chanson qu'il aurait composé mais qui n'a apparemment pas de trace physique disponible. Fait troublant, dans la notice qui lui est consacrée, on a découvert avec étonnement et jubilation que sa mère s'appelait Roseline... Bouexi et était originaire de Saint-Malo !!!


Coquillages et crustacés

Le Studio de La Nouvelle Vague, toujours sous l'interdiction d'ouvrir ses portes au sortir du confinement, "Magic" Jean-Ba a trouvé chez Fabien et son Studio St Lu (Saint-Lunaire) l'endroit idéal pour terminer le mixage de l'album allié à un paysage magnifique où nous nous dégourdissions les jambes après une grosse journée à agiter nos neurones dans l'antre du studio. Grâce au matériel à disposition et à la dextérité de "Magic" Jean-Ba, devenu un expert dans l'art de manipuler toutes sortes de savants boutons, nous avons pu nous atteler à cette dernière étape du mixage. Les derniers choix ont pu être effectués pour introduire et éliminer des chansons. Ainsi, nous vîmes le retour des Haricots sont pas salés, dans une version live détonante, qui reflète bien ce que sont nos concerts, et dénichée dans nos archives. Mais comment ajouter une chanson live à un album studio ? Écoutez l'album Sign o' the Times et vous saurez comment... On a dû dire au revoir au Blues du cajun et créer de nouvelles pièces pour donner vie concrètement à Lune Bayou grâce à des ajouts de dernière minute de Thomas Ottogalli à la guitare. C'est Buster qui a eu la riche idée de donner ce titre aux trois interludes qui sont dans l'album. Un clin d’œil aussi à notre premier album où nous avions eu recours à ce moment instrumental avec Clavier minuit. Avec l'expérience, je comprends maintenant pourquoi tant de groupes se sont arraché les cheveux, sont entrés en dépression ou ont tout simplement splitté avant que leur album ne soit terminé. Mixer c'est passionnant mais c'est une épreuve éreintante et encore plus pour celui qui tient les manettes ("Magic" Jean-Ba). Vous avez la responsabilité du son de ce que vous manipulez et le caractère inéluctable et définitif rend la manœuvre solennelle. Buster et moi, assis derrière Jean-Ba, à lui dire "oui mais non..." : c'est épuisant. Fort heureusement, "Magic" Jean-Ba a su trouver la ressource nécessaire pour terminer le mixage, mais ce n'était pas encore terminé. Mastering, vous avez dit master !


Master et clap de fin sonore

Il est très difficile d'être juge et parti. Ce n'est pas recommandé et c'est le cas pour la dernière étape relative au mastering. Bien souvent méconnu, cette tâche est pourtant cruciale et déterminante dans le son final de l'album. En gros, dans les étapes précédentes, vous avez convoqué tous les ingrédients, vous les avez assemblés dans un ordre particulier, vous avez ajouté des épices pour rehausser le goût, vous avez vérifié la cuisson en gardant un œil sur la montre, laissez mijoter et maintenant il faut servir et présenter le plat. Et bien le mastering c'est ça ! C'est l'habillage définitif, le dressage des assiettes. On a bien essayé de s'y coller mais pas moyen d'y arriver. On a la chance d'avoir dans nos rangs des talents multiples et variés. C'est Thomas Ottogalli (lead guitare du CBB) qui avec le recul et l'expérience nécessaire a pu franchir cette dernière marche dans le plus grand respect des étapes antérieures. Il a su habiller l'ensemble pour que vous soyez en totale immersion à l'écoute de l'album. Enfin c'est ce qu'on ressent avec Buster.

 

Voilà vous savez tout ou presque... Lune Bayou s'est étalé en définitive sur une période de deux ans et reflète parfaitement ce vers quoi nous voulions aller. Ceci n'est pas un album de musique cajun traditionnel, ce n'est pas notre propos avec le big band. C'est notre cajun fantasmé à nous, mélangé avec nos ingrédients pour emmener ces magnifiques chansons ailleurs et participer modestement à ce que celles-ci perdurent. Et si vous êtes curieux, mais vous l'êtes si vous lisez ces mots, vous pourrez aller chercher les versions initiales et découvrir la musique cajun traditionnelle. Alors là on pourra dire qu'on aura réussi notre coup !

 

A bientôt en vrai...

Bob Aldus Bouexi, novembre 2020.